Tome I Journées 1925-1944, 832 p.
(ISBN 978-2-35873-170-6)
Tome II Journées 1945-1971, 896 p.
(ISBN 978-2-35873-211-6)
ISBN 978-2-35873-212-3
68 €
Coffret
Ce précieux coffret, dont le tirage a été limité à 500 exemplaires, réunit les deux volumes de la première traduction intégrale du journal du poète grec Georges Séféris (1900-1971), premier écrivain de son pays à recevoir le prix Nobel de littérature en 1963.
L’image choisie pour l’illustrer est une peinture à la tempéra de Nicolas Ghikas, qui fut l’ami de Séféris, et à qui l’on doit le portrait qui apparaît en frontispice de The King of Asine and other poems, la première traduction anglaise du poète, parue en 1948.
« Dimanche 12 janvier [1941]
Chez Ghikas, que je revoyais après de nombreux mois. C’est la première fois, depuis le début de la guerre, que je le trouve au milieu de ses outils de travail : pinceaux, couleurs, toiles. J’ai quitté le ministère tard dans la soirée, dès que l’alerte a été levée : je ne voulais pas être en retard. Un jeune Anglais était là aussi, avec sa femme. À table, la conversation a porté sur l’art. Puis un autre officier anglais a fait son apparition (Woodhouse : il connaît le grec et parle d’Eliot), en compagnie d’un ami, mitrailleur à bord d’un avion. Ghikas nous montre les dessins auxquels il travaille pour illustrer l’Odyssée de Kazantzakis : des corps nus au trait épais, sans ombrage. Le mitrailleur les regarde à son tour, avant d’exprimer son avis d’une voix très bégayante. Nous nous sommes séparés peu après minuit.
À peine étions-nous sortis dans la rue que ce petit homme à l’élocution ralentie, aux yeux malins, qui fumait la pipe, s’est dirigé vers une voiture qui l’attendait : « Good night, I must fly ! » La phrase fut prononcée sans aucune difficulté. Pendant un instant j’ai songé à toutes ces images qui viendraient se bousculer dans sa tête, si son avion venait brusquement à tomber : la barbe d’Ulysse, le corps dénudé d’Hélène, les cornes du Minotaure – toutes ces lignes embrouillées qui rivaliseraient pour le maintenir en vie, comme un parachute.
Une phrase résonne dans ma tête depuis plusieurs jours : se forger une âme nouvelle. »
Georges Séféris, Journées 1925-1944, p. 473.
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