Le Monde des Livres - Antoine Jaccottet aime les livres au long cours

 Le Monde des Livres - Antoine Jaccottet aime les livres au long cours
21 janvier 2011

Antoine Jaccottet aime les livres au long cours

La nouvelle traduction des Ambassadeurs, de Henry James, est l'un des deux derniers paris insensés d'Antoine Jaccottet, responsable du Bruit du temps – l'autre étant Voyage au pays des Ze-Ka, de Julius Margolin, l'un des plus puissants témoignages sur le goulag (Le Monde du 19 novembre). Les deux livres se ressemblent. Ce sont des pavés de plus de 700 pages, édités avec soin et "redécouverts" par Antoine Jaccottet, ex de la collection "Quarto", chez Gallimard, et fils du poète et traducteur Philippe Jaccottet. C'est la marque de fabrique de cet éditeur méticuleux qui a lancé sa maison il y a deux ans, avec un premier coup d'audace, en exhumant un best-seller britannique du XIXe siècle, L'Anneau et le Livre, de Robert Browning, présenté en édition bilingue. Soit 1 424 pages !

"Je ne suis pas rentré dans mes frais avec ce livre", admet-il, mais le "bruit" fait autour lui a permis d'être repéré par des libraires et des critiques. "Un livre en amène un autre", constate-t-il. Son catalogue comprend pour l'instant 25 titres. De fait, il regorge de projets ambitieux. Mais avec Cécile Meissonnier, sa seule collaboratrice, il ne peut pas aller plus vite que la musique. Il s'est lancé dans une édition en six volumes des nouvelles de D. H. Lawrence. Sont aussi prévus, pour 2011, l'édition complète des œuvres d'Isaac Babel (1894-1940), dont la traduction a été confiée à Sophie Benech, et la publication de la biographie de référence du poète Ossip Mandelstam, de Ralph Dutli (traduite de l'allemand). Eclectique, Antoine Jaccottet a aussi acquis les droits de l'œuvre de Léon Chestov (1866-1938), un philosophe russe de l'entre-deux-guerres, très prisé dans le monde anglo-saxon.

Mais Antoine Jaccottet ne s'arrête pas aux pavés. En mars, il fera paraître Henry VIII, la dernière pièce de théâtre politique de Shakespeare, dans la traduction du poète André du Bouchet. "Aujourd'hui, on ne la trouve pas en pièce unique. Qui sait, cela donnera peut-être l'idée à un metteur en scène de la représenter ?"

                                                                                                                                                                                             Alain Beuve-Méry