Ce chef-d’œuvre de Fontane avait été traduit sous le titre Jours disparus dans le volume Bouquins où Claude David avait réuni en 1992 quatre romans de Fontane avec le texte de Thomas Mann. Ce volume est épuisé depuis longtemps et le roman n’a jamais été publié séparément en français. La traduction de John E. Jackson, poète, auteur de nombreux essais critiques, dont De l’expérience poétique publié récemment au Bruit du temps, réussit à être d’une grande élégance tout en restant extrêmement fidèle à l’original sans en gommer les complexités.
Sous jaquette illustrée
352 pages
13,5 x 20,5 cm
Traduction de l’allemand, préface, notes et chronologie
par John E. Jackson
Roman
Paru en 1891, Perdu à jamais [Unwiederbringlich en allemand] constitue avec Effi Briest et Le Stechlin l’un des plus beaux récits de Theodor Fontane (1819-1898) dans lequel Thomas Mann puis, plus tard, Günter Grass s’accordèrent pour reconnaître le plus grand romancier allemand du XIXe siècle. Située dans la province du Schleswig-Holstein (alors objet de querelle politique et militaire entre la Prusse et la Danemark) ainsi qu’à Copenhague, cette histoire d’amour à la conclusion tragique permet au lecteur d’admirer non seulement la maîtrise avec laquelle le récit est construit et mené mais aussi, et surtout, le génie avec lequel Fontane déploie un art de la conversation dont il n’est guère d’exemple en France avant Le Côté de Guermantes. Roman de société, Perdu à jamais est simultanément le tableau de la dégradation progressive d’une union conjugale dans laquelle les valeurs amoureuses aussi bien que les valeurs morales, sont ressaisies dans un équilibre qu’on ne peut qu’admirer. Si Fontane tient en effet la gageure d’accompagner ses protagonistes, le Comte Helmuth Holk et son épouse, Christine, sans jamais se départir d’une sorte de neutralité bienveillante capable de rendre justice à l’un et à l’autre, et sans jamais permettre à son récit de verser dans des jugements unilatéraux, son sens de la magie romanesque fait apparaître en même temps toute l’action dans une lumière aussi mélancolique que séduisante. Si les personnages évoluent dans des sphères à la fois élevées et différenciées (le château solitaire de Holkenäs près de Flensbourg et la cour de la vieille princesse Marie Éléonore du Danemark), le feuilleté social n’en est pas moins respecté grâce à la présence de personnages secondaires (les enfants du couple, les pasteurs, les domestiques) dont le relief s’impose aussi et contribue à rendre le récit inoubliable.
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